samedi 17 juillet 2010

Sens des corrections de mémoires

J'ai passé une partie de la journée à pré-corriger un mémoire de fin d'études. Cette correction est certainement utile à l'auteur. Mais à quoi sert-elle ? Statistiquement parlant, c'est probablement le dernier écrit universitaire de la personne. Le sujet est pertinent : enquête auprès d'élèves d'un collège sur les représentations quant au racisme. Il y a très peu de publicatrions et recherches à ce sujet. On pourrait év. en faire un article. Mais cela demanderait du travail supplémentaire.
Dans l'état actuel des choses, ces mémoires de fin d'études restent un écrit de type "exercice de style" qui est lu par seulement deux personnes, les deux rapporteurs. A quoi bon de corriger alors minutieusement un mémoire avant sa remise dans quelques jours ? Est-ce du travail superflu ? Le règlement l'interdit. L'enseignant a le droit de lire des chapitres d'une thèse en cours d'écriture, de les corriger - mais le même geste est interdit pour le mémoire de fin d'étude. C'est pourtant à ce niveau que l'étudiant en a le plus besoin.
Je suis certainement l'un des rares enseignants à me donner tant de peine. Est-ce par acquis professionnel ? Mes corrections ne changent pas sur le fond la qualité du travail, mais tous les auteurs commettent à peu près les mêmes erreurs. Comme ils n'ont jamais appris à présenter un écrit scientifique, c'est le seul moment à l'apprendre - ou jamais.
Ce soir, j'aurais pu aller au cinéma, en discothèque… au lieu de corriger un mémoire. Après la remise officielle, on me demande seulement de le lire et d'écrire un rapport. C'est à cette tâche que se limite, en principe, mon travail.
J'ai des sérieux doutes sur le sens de mon travail de correction. Mais laisser rendre l'étudiant sciemment un travail qui a des erreurs de base, me déplaît fortement. Il vaut mieux lui donner des conseils avant sa remise du mémoire que de lui donner une mauvaise / une moins bonne note après. De plus, il s'agit du respect devant le temps et l'énergie que l'étudiant a consacré à sa recherche. Travailler pendant trois mois sur un sujet et savoir que seulement deux personnes vont la lire n'est pas très gratifiant…

Cela dit, il m'a paru toujours absurde de tout point de vue (pédagogique, scientifique, respect de la personne…), de laisser rendre un travail qui n'est pas correct, sans faute. Je tiens cette approche de mes pratiques de la pédagogie Freinet :
• On n'écrit pas pour écrire. Si l'élève / l'étudiant écrit pour l'enseignant, il ne s'agit pas de communication, mais d'une corvée, d'un exercice de style imposé. Il est donc "normal" que l'écrit reste la plupart du temps truffé d'erreur.
• On publie pour communiquer quelque chose qui fait sens et qui s'adresse à une autre personne ayant envie de lire le texte. AInsi, à l'école, l'élève écrit pour le journal et il veille , ensemble avec ses camarades, à ce que le texte publié soit "parfait". A l'université, cela signifie qu'il fait publier un résumé dans une revue scientifique. Je m'y attèle et pour un certain nombre de mémoires , les étudiants écrivent des résumés publiables. Mais cela demande du travail…

Quod erat demonstrandum : la correction reste une phase utile dans un travail de production.


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